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Crédit photo: Groupe Saint-Hubert / Archives

« Le détail alimentaire est une machine complexe » : St-Hubert investit pour rester compétitif

15 avril 2025 | Par Bastien Durand

En tant que producteur et distributeur de produits alimentaires sous la marque St-Hubert, ainsi que pour 26 autres marques, le groupe engage des investissements dans ses usines de production au Québec pour soutenir la croissance de son activité. L’entreprise annonce dans un communiqué investir plus de 11 millions de dollars dans les usines de Boisbriand et de Blainville pour moderniser les équipements et ajouter de nouvelles lignes de production. Le groupe St-Hubert prévoit le lancement de 27 nouveaux produits sous la marque St-Hubert et 63 autres sous d’autres marques. Notre éditeur, Robert Dion, s’est entretenu avec Richard Scofield, président du groupe St-Hubert pour mieux comprendre la vision du groupe dans le secteur des produits alimentaires.

Robert Dion : Malgré les 11 millions, investissez-vous autant dans les produits d’épicerie qu’auparavant ?

Richard Scofield : Le marché retail évolue énormément. C’est sûr que dans le temps, on était quasiment la seule marque de restauration sur les tablettes. Notre expertise comme division détail, c’est de commercialiser des marques de restaurant et pas seulement la nôtre (Swiss Chalet, Montana, Keg, Cora ou encore Pacini), du service alimentaire sous Forever Chef et d’autres produits tel que les confitures Bonne Maman. On a une équipe de vente et de marketing qui développe des produits sur les marques restaurants. C’est une valeur ajoutée pour le client et on veut rester sur le marché.

RD : Quand tu crois à la marque en restaurant, tu peux y croire en épicerie. Mais tu fais des marques aussi pour des restaurants qui pourraient être tes compétiteurs...

RS : Oui, pas nécessairement compétiteurs, mais en effet, on est ouvert à ça et on a discuté avec plusieurs autres restaurants ces derniers temps. Maintenant faut qu’on réussisse à amener de la valeur ajoutée pour eux.

RD : Quand tu parles de détail, c’est le groupe St-Hubert qui gère tout ce qui est Recipe à travers le Canada, ça comprend combien de produits en tout ?

RS : Alors tout dépend ce qu’on entend par produits mais on parle de près de 400 sku (Stock Keeping Unit) incluant St-Hubert, gérés par nous, et l’ensemble de l’offre détail des bannières sous la gouverne de Recipe. On fabrique, on fait co-fabriquer pour nous selon nos marques, on importe et parfois on fait aussi de la représentation de marques pour leur faire de la place à l’épicerie.

Sans vouloir parler chiffres, le détail représente une partie très importante du Groupe St-Hubert. À la différence avec la restauration, les ventes sont à nous. Avec les franchisés, on gagne avec les royautés.

RD : T’es quand même un gars de la restauration à la base, qu’est-ce que t’as trouvé le plus difficile à assimiler dans le marché de l’épicerie ? Le réseau de distribution ? La structure de prix ?

RS : C’est pas une critique envers le système au Canada mais je pense que c’est le fait qu’on est peu de joueurs sur le marché. Et avec la structure de nos clients, les règles sont strictes. Par exemple, si on a des augmentations de prix à faire... C’est complexe, le détail alimentaire est une machine complexe. C’est là vraiment la différence avec la restauration où l’on va être beaucoup plus agile.

Pour moi, à l’épicerie, on prendrait pas le luxe de faire une erreur. Tandis qu’au resto, on lance un produit et si ça ne marche pas, on le retire. On perd moins et l’expérimentation est plus simple. Tandis qu’en épicerie, les coûts sont plus importants sur le développement de produits. Il y a de l’inventaire à gérer avec un risque plus élevé. Il faut aller beaucoup plus dans les détails et la recherche du bon produit afin de s’assurer que ce qu’on lance va fonctionner.

RD : Peu de joueurs, beaucoup de volume aussi... Cela créé une structure plus difficile à manœuvrer ?

RS : Plus complexe à manœuvrer, oui.

RD : La division transformation alimentaire est donc encore en croissance ?

RS : Pour nous, le monde doit manger et dans les temps difficiles où le monde va moins au restaurant, on le retrouve forcément à l’épicerie à un moment. Les deux écosystèmes s’équilibrent pour assurer une pérennité d’affaires dans notre expertise en alimentation.

On a environ 350 emplois directs dans notre division produits alimentaires, si on prend la distribution et les deux usines. On fabrique environ 160 produits sur les 400 que l’on commercialise. Les conserves de sauces fraîches, par exemple on le fera pas, on n’a pas la capacité. Mais tout ce qui est côtes levées, pâtés, quiches, salades de chou et de pommes de terre, ça c’est nous. Et là justement on investit davantage dans les usines pour donner une meilleure flexibilité pour s’adapter à des produits qui sont plus en ligne avec les tendances d’aujourd’hui. On a défini des marchés dans certaines catégories qui viennent à maturité et où l’innovation est difficile.

RD : Tu veux dire qu’on aura peut-être pas toute notre vie le pâté à la viande ? (rires)

RS : La tourtière va toujours être là, mais les générations futures risquent d’en manger moins.

Propos recueillis par Bastien Durand